Si l'agence de voyages tchèque en ligne Kiwi.com ne vous rembourse pas la somme d'un voyage annulé, adressez-vous directement au Centre Européen des Consommateurs (CEC) France. Ce centre vous aidera à trouver une solution amiable à votre litige transfrontalier (dans l'Union européenne, ainsi qu'en Islande, en Norvège et au Royaume-Uni).

Les arnaques du ciel: Lastminute.com et kiwi.com

Ayant confiance dans les recommandations scientifiques largement relayées par nos gouvernements, je réserve sans grande inquiétude, le 16 février 2020, un voyage de six semaines : Martinique - Paris, Valence - Londres, Bretagne - Canada.
Pour organiser ce périple, je réserve mes vols transatlantiques auprès de Level France (filiale du groupe IAG [1])et d’Air Canada, via le site Lastminute.com, bien que l’opération soit finalement prise en charge par son partenaire Kiwi.com.
Quant aux vols intra-européens, je les achète directement sur les sites d’Air France et de British Airways.

Décourager les remboursements

Lorsque mes voyages sont annulés les uns après les autres en raison de la pandémie de Covid-19, je découvre à quel point les politiques de remboursement varient d'une compagnie aérienne à l'autre.
Air France se distingue comme la plus honnête : elle propose à ses clients une procédure de remboursement en ligne simple, claire et efficace.
En revanche, British Airways semble avoir trouvé une astuce pour décourager les demandes : elle exige que toute requête soit formulée par téléphone… une mesure mise en place en pleine pandémie, alors que ses centres d’appel sont fermés. Quelle ironie !
Auparavant, la compagnie imposait que les demandes soient exclusivement traitées en ligne, via son site internet [2]. Après deux heures d’attente téléphonique, on finit évidemment par raccrocher et se résigner à l’option en ligne, qui se résume à un bon d’achat ("voucher") valable jusqu’en avril 2021 — une validité finalement prolongée jusqu’en avril 2022, face à l’ampleur de la crise sanitaire et à la colère croissante des clients.

Les astuces pour entuber le consommateur

Enfin, venons-en aux cas les plus problématiques : Air Canada et Level France — à moins que le véritable blocage ne provienne des agences intermédiaires, Kiwi.com et Lastminute.com, manifestement à l’affût du moindre gain.
Lorsque le premier segment de voyage, Fort-de-France – Paris, est annulé en avril par Level, Kiwi et Lastminute.com s’empressent de m’envoyer des courriels et des SMS, me demandant en urgence de choisir entre une nouvelle date ou un remboursement.
En cliquant sur "remboursement", deux options s’offrent à moi : un bon d’achat Kiwi immédiat de 83 €… pour un billet payé 800 €, ou un remboursement complet dont la procédure est annoncée comme longue, pouvant dépasser trois mois.
Il est évident que si Kiwi.com propose un bon d’achat de 83 € utilisable immédiatement, c’est qu’il y a anguille sous roche. Aucune entreprise ne distribue des avantages sans bénéfice en retour : ce serait contraire à la logique même du profit, fondement de tout modèle économique.

Le véritable problème vient de l’ambiguïté de cette demande : opter pour un remboursement aurait pour conséquence d’annuler l’ensemble de l’itinéraire, y compris les vols encore prévus (Paris – Montréal et Montréal – Martinique). Cela m’aurait privé de tout recours pour ces segments non encore annulés par les compagnies aériennes. Si j’avais choisi de les annuler moi-même, j’en aurais endossé l’entière responsabilité et n’aurais plus pu faire valoir mes droits.

Alors, à qui profitent vraiment ces choix proposés par Kiwi.com ou Lastminute.com ? Certainement pas au client, qui a payé pour un service dont une partie ne sera pas assurée.
Ainsi, résolu à ne pas compromettre mes droits, je choisis… de ne rien faire.

Pas de service à la clientèle

En mai, je constate que mon deuxième segment transatlantique est annulé sur la plateforme de Level, sans que Lastminute.com ou Kiwi.com ne m’en informent. Pire encore : lorsque je saisis mon numéro de réservation sur leur site, celui-ci semble avoir tout simplement disparu. Aucune trace de réservation sous ce numéro. Je suis sidéré.

Heureusement, en cliquant sur le lien contenu dans le document PDF du courriel de confirmation reçu le jour de l’achat (comme quoi il est toujours utile de conserver ses e-mails), je parviens à retrouver mon itinéraire sur le site de Kiwi. J’y découvre que mon deuxième segment de voyage a bien été annulé par Level, filiale d’Iberia et de British Airways.
Mais là encore, je suis bloqué : le segment Air Canada, lui, n’a pas été officiellement annulé.

Sur l’application Air Canada de mon iPhone, je remarque pourtant que mon vol, initialement prévu le 19 juin, a été déplacé au 21 juin, puis au 29 juin — et ce, sans aucune notification du prestataire.
Sur la plateforme de Kiwi.com, aucun changement n’apparaît : le vol est toujours affiché au 19 juin, alors qu’il a été annulé par Air Canada depuis plusieurs semaines (voir les captures d’écran ci-dessous). Exaspéré, j’essaie en vain de contacter Lastminute.com, que ce soit par téléphone ou par courriel. Rien à faire. Tout semble conçu pour empêcher le client d’atteindre le service après-vente.

Je finis donc par cliquer sur l’option "remboursement", où l’on me propose désormais trois choix :
– un bon d’achat Kiwi de 83 €,
– un remboursement "prioritaire" en six semaines, moyennant 20 € non remboursables,
– un remboursement sans frais de gestion, mais dans un délai de trois mois.

Naïvement, j’opte pour la deuxième option, pensant gagner du temps. Résultat : j’offre 20 € supplémentaires à Kiwi.com pour un service qui ne sera, en réalité, jamais assuré.

Malhonnêteté de Lastminute.com et de Kiwi.com

Trois jours plus tard, je remarque sur l’application Air Canada que le vol reprogrammé au 29 juin — auquel je n’ai jamais consenti — a tout simplement disparu. À ce moment-là, je vois brièvement apparaître sur ma réservation l’adresse e-mail d’une certaine Frantiska, de chez Kiwi.com.

Huit semaines passent avant que je ne reçoive un courriel mielleux de Lastminute.com, s’excusant de ne pas avoir pu respecter le délai de remboursement de six semaines promis (voir document ci-dessous). L’agence rejette la faute sur les compagnies aériennes, accusées de retarder les remboursements.

Six mois plus tard, toujours rien. Pire encore, Lastminute.com choisit ce moment pour lancer de nouveaux services payants associés aux réservations : "Basic Services", "Plus Services", "Premium Services". Une parfaite illustration de l’art d’être à la fois injoignable et engageant. Tout est conçu pour faire croire aux clients qu’un "service prioritaire" — bien entendu payant — leur permettra de récupérer plus rapidement l’argent dû pour des prestations annulées.

De son côté, Air Canada avait pourtant annoncé offrir un avoir à vie pour tous les clients affectés par les annulations. Mais aucun bon d’achat ne m’a jamais été transmis par Kiwi.com/Lastminute.com. Comment ne pas douter, dans ces conditions, de la sincérité et de l’honnêteté d’un voyagiste en ligne que l’on ne peut joindre ni par mail ni par téléphone ?

Pas de vol mais vente de billets chez Level

Quant à Level France, anciennement connue sous le nom d’Openskies, elle annonce le 8 juillet son intention de cesser ses activités en France, sur le territoire français. Cela ne l’empêche pourtant pas de continuer à vendre des billets transatlantiques pour le mois de décembre, sous le code Level ou celui d’Iberia. Pourquoi se priver de recettes lorsqu’on n’est plus tenu de rembourser ses dettes ?
Sur leur site, les réservations restent ouvertes, et le comble, c’est qu’avant même de finaliser le paiement, on vous propose — pour un "modique" supplément de 150 € — d’être surclassé en premium.
Wow ! Super cool… l’arnaque.

Comment peut-on permettre à une compagnie de commercialiser des vols qu’elle n’a plus l’intention d’assurer ou dont elle n’est plus en mesure de garantir l’opération ?
Comment tolérer de telles pratiques, pour le moins douteuses, de la part d’une entreprise appartenant au groupe IAG, multinationale ayant réalisé un bénéfice de 3,2 milliards d’euros en 2019 ?

Il est clair que nous, consommateurs, sommes les premières victimes.
Mais nous disposons d’un levier : le boycott.
Refusons de faire affaire avec les entreprises qui utilisent des procédés aussi cavaliers.
Méfiez-vous des plateformes comme Lastminute.com et Kiwi.com, qui abandonnent leur clientèle sans recours, et opèrent dans une opacité totale.
Il est désormais préférable — voire nécessaire — de réserver vos voyages directement sur les sites des compagnies nationales, où l’État reste (même minoritairement) actionnaire, seul garant, à ce jour, d’un minimum de transparence et de responsabilité en période de crise.

form-idea.com, le 11 novembre 2020.

Mise à jour

1) Au 7 novembre 2021, soit vingt-et-un mois après l’annulation de ma réservation, aucun remboursement n’a été effectué par Kiwi.com. Pas même les 20 € prélevés pour le traitement prioritaire de ma demande. Rappelons que l’agence estimait à six semaines le délai de remboursement pour ce service payant.

2) Le 6 juillet 2022, à la suite d’un courriel dans lequel je mentionne les articles 5, 7 et 8 du règlement CE n°261/2004, Kiwi.com me répond pour m’informer qu’Air Canada a bien procédé au remboursement du vol Montréal – Fort-de-France. Cependant, la société tchèque affirme traiter les demandes dans l’ordre chronologique et conditionne le versement de cette somme à la réception du remboursement de la part de Level, demandé en juin 2020. En d’autres termes : tant que Level fait la sourde oreille, Kiwi.com conserve le remboursement d’Air Canada.

3) Ce même 6 juillet, je contacte directement Level via leur compte Twitter afin de réclamer le remboursement de mes deux vols (Fort-de-France – Orly et Orly – Montréal), en invoquant, là encore, le règlement européen. Leur réponse ne se fait pas attendre : dès le lendemain, je reçois deux courriels de confirmation, pour des montants respectifs de 278 € et 169,65 €. Une semaine plus tard, l’argent est crédité sur mon compte bancaire.
Il est essentiel de souligner que Level ne passe désormais plus par Kiwi.com pour les remboursements. Merci à eux : rien ne prouve que Kiwi.com aurait agi en intermédiaire honnête.

4) Les courriels que j’envoie à Kiwi.com les 19 et 21 juillet 2022, les informant que Level a procédé au remboursement (copies des messages de confirmation à l’appui), et leur demandant en conséquence de me reverser la somme due par Air Canada, resteront sans réponse.

5) Il apparaît de plus en plus clairement que la compagnie aérienne espagnole Level n’a jamais été contactée par Kiwi.com, ce qui a permis à l’agence tchèque de conserver, pendant des mois, les fonds d’Air Canada initialement destinés au client.

6)  Je saisis le Centre Européen des Consommateurs (CEC) France pour leur exposer mon litige. Le 9 novembre 2022, leurs homologues tchèques obtiennent une réponse de Kiwi.com : l’agence affirme que le remboursement de 254,04 €, correspondant à la somme reçue d’Air Canada, aurait échoué en raison de l’expiration de ma carte bancaire utilisée lors de l’achat. Pourtant, Kiwi.com ne m’a jamais informé de ce prétendu échec.

Parallèlement, le 27 octobre 2022, Kiwi.com me contacte pour me demander de choisir une méthode de remboursement. Deux options me sont alors proposées :

  1. Un avoir Kiwi d’une valeur de 220 livres sterling,

  2. Un virement bancaire de 191 livres sterling — soit une somme nettement inférieure aux 254 € dus.

Au taux de change du 27 octobre 2022 (1,16 £/€), les 191 £ ne représentent qu’environ 221 €, soit 33 € de moins que le montant réellement dû.
Tout laisse donc penser que Kiwi.com a tenté de tirer un petit profit au passage, en minorant la somme remboursée au client. Une nouvelle illustration du manque de transparence de cette agence.

Kiwi.com me laisse alors une semaine pour faire mon choix. À défaut de réponse dans ce délai, ils considèrent automatiquement que j’ai opté pour un avoir.

Heureusement, grâce à une capture d’écran de l’offre reçue, le Centre Européen des Consommateurs (CEC) a pu transmettre mon dossier au service en charge de la coopération européenne au sein de la DGCCRF — l’administration française responsable de la répression des fraudes et de la protection des intérêts collectifs des consommateurs. Les services compétents de la Commission européenne ont également été informés.

7) Finalement, le 8 décembre 2022, Kiwi.com me verse la somme manquante de 32 €, mettant ainsi un terme, tardif mais complet, à ce remboursement qui aura nécessité plus de deux ans de démarches.

Notes de l’auteur

[1] IAG (International Airlines Group) est un groupe aérien multinational qui regroupe plusieurs compagnies : British Airways, Iberia, Aer Lingus, Vueling et Level.

[2] Certaines grandes compagnies ont profité de la crise sanitaire pour se séparer de leur personnel le plus ancien — et donc le plus coûteux. Plusieurs témoignages font état de pressions proches du harcèlement moral, exercées par les directions des ressources humaines.La BBC a notamment rapporté les fortes pressions subies par de nombreux membres d’équipage de British Airways. Il faut rappeler que William Walsh, PDG d’IAG à l’époque, et Alex Cruz, PDG de British Airways de 2006 à octobre 2020, ont progressivement transformé cette compagnie historique — autrefois vitrine du savoir-faire britannique — en une low-cost banalisée, tant au niveau des prestations proposées que du traitement réservé au personnel, sans parler de la dégradation du système informatique. Pendant que ces restructurations brutales touchaient les salariés, aucun sacrifice salarial notable n’a été consenti par la direction. À noter également : en 2018, British Airways a été victime d’un piratage massif, exposant les données personnelles de clients ayant effectué une réservation entre le 21 août et le 5 septembre. Selon la BBC, cette faille de sécurité serait due à un sous-investissement chronique dans le système informatique, l’entreprise ayant préféré privilégier le versement de dividendes.

Messages de Lastminute.com & Kiwi.com

Air Canada

Départ du vol au 21 juin. Lastminute.com ne met pas à jour ce changement

Level France (Openskies) | filiale de IAG (British Airways-Iberia)

Voyager aux Antilles | Que choisir ?

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2 thoughts on “Les arnaques du ciel: Lastminute.com & Kiwi.com

  1. P DORE says:

    Il est triste que tout cet argent “volé” serve aux parachutes dorés des PDG et DG et que le personnel navigant des compagnies aériennes se retrouve au final sans rien.

  2. delphine says:

    Kiwi : une arnaque
    La plate forme change mon vol : je pars à 18h à la place de 8h du matin, j’ai une escale de 23 h à la place de 12h. On ne me demande pas mon avis sur ces modifications de vol qui entrainent des frais d’annulation de réservations d’hôtel et de trek. Travelfrom me le demande pour un autre vol alors que la modification n’est que d’une heure. Je trouve un vol de remplacement plus intéressant pour moi toujours en passant par kiwi et avec la même compagnie aérienne. Je suis prête à payer le supplément. Mais c’est une fin de non recevoir. On ne sait trop pourquoi.
    Autre mésaventure avec Kiwi : Je fais une erreur : je clique sur juillet à la place d’aout. Je m’en rends compte immédiatement mais kiwi refuse et ne me rembourse que 10 euros alors même que la loi en vigueur permet une annulation dans les 24 heures.
    Kiwi n’a pas signé de convention avec le médiateur du tourisme et l’on comprend pourquoi. Il y aurait trop de réclamations. Je ne réserverai plus jamais avec cette plateforme et j’encourage tout le monde à faire de même.

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November 10, 2020