Temps de lecture : 5 minutes

La première victoire réconfortante est celle de la communication remportée par l’Ukraine. Vouloir éradiquer les frères slaves serait une folie suicidaire de la part de Poutine. Quant à l’OTAN en état de mort cérébrale selon Emmanuel Macron, elle semble être sortie du coma.

L’Ukraine est un pays que je connais bien et auquel je me suis attaché et il va sans dire que le sommeil m’a quitté ces dernières nuits tellement le choc fut grand à l’annonce de l’invasion russe. En tant qu’historien, les images me rappellent le blitzkrieg, l’attaque surprise de la Pologne par les Nazis. Pendant plus d’un mois, devant la presse les Russes ont traité les Américains d’hystériques, la Russie n’ayant aucunement l’intention d’envahir un pays.

Pourtant, l’épisode précédent, l’annexion de la Crimée aurait dû nous alerter. Tous les signes des dérives d’un nationalisme russe expansionniste étaient présents. Malheureusement, les Occidentaux ont préféré condamner sans vraiment sanctionner, pensant que Poutine resterait un homme rationnel. Il faut dire que le terrorisme islamique qui nous a tous impactés d’une façon ou d’une autre est devenu l’ennemi n°1 ; de surcroit, certains ont même vu dans l’intervention brutale de la Russie en Syrie un allié protégeant la civilisation judéo-chrétienne[1] et ce, malgré de nombreuses mises en garde de certains intellectuels sur la véritable nature du régime poutinien tels que l’historien américain Timothy Snyder et le dissident russe Garry Kasparov.

Après le choc vient la colère : comment pouvons-nous la mettre au service de la lutte pour une Ukraine libre ? Il serait vain de parler de paix tant que Poutine est au pouvoir. Son cynisme et son jusqu’au-boutisme nous mènent-ils à un point de non-retour ?

Le dimanche 27 février, je reçois un message d’un ami me disant ceci :

Hi Pierre ! Thanks for your support! I’m with my parents in my village ready to fight for my Ukraine! For my land! Tell all the world about it! Thanks my dear friend! God with us![2]

Cet Ukrainien totalement trilingue ukrainien-russe-anglais est un patriote, chrétien marié à une femme de confession juive, père de trois enfants, rien de nazi comme essaie de nous faire croire la propagande russe.

Le principal coupable de cette guerre contre l’Ukraine est Vladimir Poutine, il n’en fait aucun doute. Cependant, les citoyens russes le sont aussi par leur soutien, leur fatalisme, leur inaction et par une certaine amnésie collective face à l’histoire. D’une part, les retraités et les fonctionnaires – traumatisés par l’éclatement de l’URSS et surtout par le chaos économique des années 90 – sont en quête de grandeur nationale et ont fait de cet ancien agent du KGB un autocrate. Ils s’abreuvent devant leur poste d’images impériales du maître du Kremlin. Ils gobent tout ce que la propagande officielle leur dit sans avoir la moindre curiosité de connaître la version des médias indépendants sur Internet. Ils savent qu’il y a une guerre en Ukraine mais préfèrent le récit officiel. Les oligarques et les technocrates corrompus avides d’enrichissement personnel sont de même pointés du doigt. Et enfin, il y a cette église orthodoxe russe qui promeut le nationalisme russe panslave : une nation, une langue, une religion.  Le patriarche de Moscou n’a qu’un seul souhait : mettre fin à l’église orthodoxe de Kyiv. Cet usurpateur du message du Christ attise le nationalisme agressif de Poutine. Son église est aussi criminelle que le gouvernement moscovite.

Nous payons cher le prix de la politique déraisonnable de l’ancienne chancelière allemande qui a imposé une politique d’austérité terrible au reste de l’Europe, exigeant de ce fait des coupes budgétaires de ses partenaires européens, la réduction les dépenses militaires, sauf s’il s’agissait de vente de sous-marins allemands à la Grèce. De plus, elle a mené une politique de dépendance énergétique russe, refusant de sacrifier le gazoduc Nord Stream 2 et ce, malgré la guerre en Géorgie de 2008, l’annexion de la Crimée en 2014 et la guerre instrumentalisée par la Russie dans le Donbass pendant ces huit dernières années. Elle a fait preuve d’un égoïsme économique incroyable ! Maintenir le dialogue avec Poutine était son mantra et c’est le conseil qu’elle aurait donné à Emmanuel Macron avant son retrait de la politique[3].

Il y a aussi la propagande russe en Occident qui a diffusé plein de mensonges en Europe : que l’Ukraine était un pays artificiel, divisé entre Ukrainiens et russophones, à l’Ouest les ultra-nationalistes ukrainiens étiquetés comme nazis, à l’Est les russophones discriminés, mensonges répétés sur les chaînes Russia Today et Spoutnik et par d’ambitieux pique-assiettes médiatiques éhontés. Des idiots utiles ! Les personnalités politiques ayant des intérêts dans le monde nébuleux des affaires russes tels que l’ancien chancelier allemand Schroeder, l’ancien premier ministre Fillon, Berlusconi, Mariani et Le Pen. Quelle honte !

Devant cette agression extrêmement brutale d’un pays dit civilisé sur une nation pacifique et démocratique qu’est devenue l’Ukraine, nous devons nous interroger sur les menaces que font peser les régimes autoritaires sur nos démocraties.

La première victoire qui me réconforte est celle de la communication remportée par l’Ukraine. Vouloir éradiquer leurs frères slaves serait une folie suicidaire. L’OTAN en état de mort cérébrale selon Emmanuel Macron semble être sortie du coma.

Et les millions de réfugiés dans l’Union européenne seront encore plus européistes et atlantistes.

Peuple russe soulevez-vous ! Poutine reste mortel comme nous tous !


[1] Pourtant Poutine a laissé Kadyrov instaurer une république russe islamique en Tchétchénie, de même qu’il a laissé les Arméniens orthodoxes se faire expulser d’une grande partie du Haut Karabakh.

[2] Traduction : « Salut Pierre ! Merci pour ton soutien ! Je suis avec mes parents dans mon village prêt au combat pour défendre mon Ukraine, ma terre ! Dis-le au reste du monde ! Merci mon cher ami ! Dieu (est) avec nous ! »

[3] On ne peut pas reprocher au Président Macron d’avoir tout fait pour préserver la paix.

Version disponible en anglais, en espagnol, en russe et en ukrainien.

Follow Us

Facebooktwitterlinkedinrssyoutubeinstagram

2 thoughts on “Ukraine & velléités occidentales explosées

  1. Soizic says:

    Un bel article, moi aussi je suis très triste pour ces Ukrainiens qui voulaient simplement être heureux et libres mais malheusement comme souvent les conflits détruisent tout.
    Je me sens impuissante vis à vis de tant de malheur.

  2. Patrick says:

    Je suis bouleversé par cette guerre. L’OTAN fait-il preuve de lâcheté en refusant de mettre en place une zone d’exlusion aérienne ? Les pays de cette alliance pourraient au moins interdire toute importation de pétrole russe… Sacrifions un peu notre confort pour des sauver des vies. Enfin, si les Chinois refusent de condamner cette horrible guerre russe en Ukraine, pourrait-on commencer à boycotter les produits “made in China” ? Cela permettrait en même temps de réindustrialiser nos pays. Après tout, les Chinois dépendent des exportations vers l’Europe et les États-Unis. Il en va de la survie de nos libertés.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

The Coloured Valentino

March 2, 2022